Chapitre 1 : La morsure

Pour le contexte : une mini tique m’a mordue sous la clavicule alors que j’étais partie en goguette dans une forêt auvergnate, je l’ai enlevée à la main. Tranquille, c’est qu’une tique, elle est vraiment minuscule et pas gorgée de sang comme les grosses tiques qu’ont les gros chiens derrière leurs grosses oreilles.

Je rentre chez moi à Paris quelques jours après et découvre à l’emplacement de la morsure une tache assez petite mais une tache quand même. Tel un petit Tamagotchi je la vois évoluer de jour en jour mais tellement subtilement que je ne sais pas si elle grossit ou si c’est moi qui l’observe trop. Une sorte de partie d’1, 2, 3 soleil avec mon épaule.

C’est très rigolo.

Quelques neurones dans mon cerveau m’envoient de subtils influx pour me pousser à la montrer à un professionnel. Mais j’aime pas les médecins, j’aime pas les pharmaciens. C’est comme des endives au jambon vivantes. Non merci, j’ai pas faim. Je me soigne au Doliprane et au jus de citron depuis 10 ans pour tout ce qui se situe entre le rhume et l’entorse. Mon corps réagit très bien. Mon corps aime le Doliprane et le jus de citron.

Au bout de quinze jours, cette tache en forme de soucoupe volante mesure une dizaine de centimètres. À force de jouer toute seule à 1, 2, 3 soleil, je me lasse et décide d’aller montrer ma soucoupe à la pharmacie en bas de chez moi. Une belle et grande pharmacie avec des écrans télés géants dans la vitrine qui diffusent des pubs Pouxit à tout va, de jour comme de nuit, via des néons à faire mourir d’épilepsie les papillons de nuit les plus robustes. Il y a au moins quatre comptoirs et plein de gens en blouses blanches qui s’agitent derrière en criant « votre diarrhée elle dure depuis quand ? » à tour de bras. Face à ce professionnalisme non dissimulé, me voici en train de demander conseil à un pharmacien en toute confiance. Bingo, je tombe sur le grand chef, le gourou, le savant, l’homme aux 10 000 conseils.

C’est le début de l’été, les pigeons pigeonnent au contraire de mon décolleté, mais la sentence tombe. Ma tache de 10 cm qui se trouve sur mon épaule suite à une morsure de tique il y a 15 jours : c’est une irritation de la bretelle de mon soutien-gorge. Mais oui ! Évidemment. Merci monsieur ! Je me sens tellement bête ! En même temps je ne suis qu’une femme sotte qui ne sait pas grand-chose, car je n’ai pas de télé pouxit dans ma vitrine.
Je suis tellement atterrée que je ne réponds rien, lui est prêt à terminer cette conversation. Mon neurone revient à la vie après sa syncope et je redis l’historique à cet homme qui n’a pas dû tout bien comprendre. Peut-être que sa télé Pouxit a eu des soucis de pixels pendant la nuit ce qui l’a empêché de dormir et l’empêche maintenant d’avoir les idées claires ? Je retente. Il me redit la même chose avec en bonus-track-direct-live un conseil : « mettez un pansement et dans 2 jours y’a plus rien ».
N’en pouvant plus devant tant d’intellect je m’incline et pars de cette somptueuse pharmacie. Cela dit, ça me donne une raison derrière laquelle me cacher pour ne pas m’inquiéter plus que ça et surtout ne pas aller voir une endive au jambon. Je sais qu’il dit n’importe quoi mais au fond ça m’arrange bien.

Ma petite soucoupe m’accompagne pendant encore un mois avant de disparaître sans que je n’aie pu lui dire au revoir, tel le Titanic qui sombre au fond de l’océan, telle Joséphine Ange Gardien qui claque des doigts.

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